En 2015, Warcraft : le commencement, la superproduction Universal à 100 millions de dollars, a été entièrement conçue au Canada. Et ce n’est pas une exception. Chaque année, ce sont plus d’une centaine de films étrangers qui sont tournés au Canada, dont plus de deux tiers sont américains. Et les séries télévisées ne sont pas en reste, tirant même la croissance du secteur, avec plus de cent séries étrangères produites en 2014-2015 (elles aussi essentiellement américaines). Parmi les prétendants aux oscars cette année, Spotlight, Brooklyn, Room, et The Revenant ont été tournés au Canada…
Le phénomène n’est pas nouveau. Depuis les années 1970, le Canada attire des tournages de films et programmes télévisés américains, jusqu’à gagner le surnom de « Hollywood North ». L’affinité culturelle entre les deux pays, qui se traduit par un rapprochement des talents (James Cameron, David Cronenberg, Atom Egoyan chez les réalisateurs canadiens travaillant avec Hollywood, Ryan Gosling, Rachel McAdams, Ryan Reynolds, Michael Cera et bien d’autres chez les acteurs), va bien plus loin qu’un simple melting pot créatif : c’est une véritable intégration industrielle de la filière qui est en train de se constituer entre les deux pays, dans une organisation réticulaire nouée autour de Los Angeles et appuyée sur Vancouver, Toronto et Montréal.
Aujourd’hui, alors que la compétition internationale pour les tournages s’est renforcée via les mécanismes de crédits d’impôt (25 % en GB, 30 % en France), le Canada reste un partenaire privilégié
de l’industrie américaine. Au-delà des tournages délocalisés pour paysages naturels (dont cette année le multi-oscarisé
The Revenant, tourné en Alberta et Colombie-Britannique, est l’exemple type), les productions américaines choisissent le Canada pour des raisons économiques (coût du travail, niveau du dollar, crédits d’impôts accordés aux producteurs etc.) et pour ses infrastructures de qualité (studios de tournages, équipes qualifiées, entreprises d’effets spéciaux et d’animation).
En 2015, le Canada a produit
Deadpool,
Pixel, une partie des effets spéciaux de
Star Wars : Episode 7 ; on y prépare
le prochain reboot de
Independance Day (
Resurgence) ou encore le prochain
X-Men (Apocalypse). Derrière ces quelques noms ultra-médiatiques, la production étrangère représente 2,6 milliards de dollars d’investissements au Canada en 2015, contre 1,8 milliard en 2014 (soit une hausse de 42 %). Le pays a capté la production de 111 longs métrages de cinéma, de 115 séries télévisées et 53 téléfilms et miniséries (source :
étude Profile 2015). À titre de comparaison, la production nationale représente quant à elle 2,9 milliards de dollars en 2015 (9 % de plus qu’en 2014) – mais le cinéma n’y compte que pour 350 millions de dollars, l’essentiel de l’investissement étant porté par la production télévisuelle. Ce qui signifie que la production étrangère au Canada pèse pour un peu moins de la moitié de la production totale (en volume d’investissements), ce qui est considérable. Pour comparaison, en France, seuls 45 œuvres étrangères (films et séries) ont été tournées en 2015 (
avant la réforme du crédit d’impôt).