Renouveau et tentative de reprofessionnalisation
Au tout début des années 2000, le cinéma pakistanais fait pâle figure. Les salles obscures sont désertées et souvent transformées en centre commerciaux. Des studios, autrefois célèbres, sont reconvertis en entrepôts industriels ou en parking. Quant aux techniciens, s’ils n’ont pu se reconvertir dans la télévision, se faire embaucher à Bollywood ou encore à Dhaka, ils deviennent, parfois, vendeurs de thé ou vivent d’autres petits métiers. Mais en 2003, alors que le président Musharraf arrive au pouvoir,
un groupe de jeunes réalisateurs pakistanais entreprend de faire revivre l’industrie nationale. Ils réalisent des films de niche, auto-financés, qui collent désormais aux préoccupations socio-économiques de la population. Et rencontrent quelques succès d’estime, si ce n’est commerciaux. Des réalisateurs tels que Shoaib Mansoor (
Khuda Ke Liye, Bol) ou Mehreen Jabbar (
Ramchand Pakistani) réussissent à s’exporter hors des frontières. De nouvelles écoles s’ouvrent, témoignant de l’optimisme qui règne pour la profession (la section « film » du National College of Arts de Lahore en 2005, la section vidéo de l’Indus Valley school of Arts and Architecture et en 2010 l’école spécialisée
SAAMPT à Karachi). Parallèlement, le lancement de
Filmazia, une chaine de télévision consacrée à la diffusion de films pakistanais apporte un bol d’air frais au secteur.
Mais les réalisateurs déplorent en bloc :
la pauvreté des infrastructures, le triste état des studios, l’absence d’un vivier d’acteurs, l’absence de festivals, l’inexistence de canaux officiels ou simplement professionnels de financement (en 2012, le gouvernement n’a alloué aucun budget au cinéma). Il faut également mentionner
les problèmes importants rencontrés par l’industrie du DVD face au piratage rampant et à la faiblesse de la régulation su r la propriété intellectuelle.
La chaine Filmazia diffuse uniquement des films de Lollywood
L’année 2012, donc, verra-t-elle la mort d’une des plus vielles industries du cinéma mondial ? Certains signaux laissent présager un répit. En dépit de l’atonie de la production, le cinéma pakistanais atteint une certaine visibilité avec, pour la première fois dans l’histoire du pays, une nomination – et un prix – aux Oscars pour
Saving Face, un documentaire réalisé au Pakistan par une réalisatrice pakistanaise sur le sort des femmes attaquées à l’acide. Également en 2012, le court-métrage
Kingdom of Women de la réalisatrice Amna Ehtesham Khaishghi a été nominé à Cannes. Et la
Pakistan Films Producers Association (PFPA), dissoute en 2006, envisage de se reformer. On annonce également pour 2013
la sortie de huit films à gros budget (pour le pays). Il est sans doute trop tôt, en revanche, pour prédire si tous ces signaux sont ceux d’une renaissance ou d’une simple rémission.
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Crédits photos :
- Image principale : cinéma à Lahore -
Zerega / Flickr
- Annonce publicitaire de la chaine Filmazia, page
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