La garantie de l’indépendance éditoriale
Au sein des entreprises de presse françaises, deux types de coopératives dominent : la société coopérative participative, la Scop et la société coopérative d’intérêt collectif, la Scic, créée en 2001. Selon la confédération générale des Scop (CG Scop), parmi les 3 177 Scop et Scic répertoriées début 2017, 32 seraient des entreprises de presse, 6 en Scic et 26 en Scop (comprenant des agences de presse et les activités d’édition de journaux, périodiques et revues), soit 228 salariés. Une goutte d’eau parmi les 35 047 cartes de presse attribuées en 2017.
Au regard de leur fonctionnement, qui repose sur la mutualisation des moyens de collecte de l’information, en particulier à l’international, la coopérative est un statut particulièrement adapté aux agences de presse. Ainsi, l’Associated Press a un statut coopératif, à l’instar de l’agence allemande Deutsche Presse-Agentur, ou de Reuters jusqu’à son entrée en bourse en 1984. Mais à l’opposé des agences de presse, où le choix du statut de coopérative se justifie par une certaine rationalité économique, le choix de ce statut pour un média hors agence relève davantage d’une mise en conformité avec des valeurs. La coopérative repose sur un fonctionnement démocratique, où 1 salarié égale 1 voix en assemblée générale, quelle que soit la part de capital détenue. Le partage des bénéfices, et du pouvoir qu’il induit, inscrit ce statut dans une histoire et une philosophie particulière.
Au sortir de la Seconde Guerre mondiale, les coopératives ou les Sapo (société anonyme à participation ouvrière) sont nombreuses au sein de la presse « issue de la Résistance » :
Le Courrier Picard, la
Nouvelle République, l’
Yonne Républicaine… Si de nombreux titres ont abandonné leur statut de coopérative dans les années 2000, certains jeunes médias restent soucieux de perpétuer cette tradition. « Il y a une vraie histoire derrière les Scop » explique Jérémie Demay, fondateur de
l’Accent Bourguignon, journal papier local édité par une Scop, crée en février 2017 et aujourd’hui en liquidation. « On a choisi la forme coopérative parce qu’elle correspond à nos idées et à notre mode de fonctionnement » explique pour sa part ainsi Catherine Tricot, gérante de la Scop
Les Éditions Regards.
Pour Julien Dezécot, directeur de publication et co-fondateur du magazine
Sans transition !, également édité par une Scop, la coopérative est une manière de « d’accompagner un mouvement qui est celui de l’économie sociale et solidaire, qui résonne avec la cohérence du propos qu’on porte, à savoir un autre modèle de société sur les territoires ». Lorsque les cofondateurs décident de lancer
Sans transition ! en 2015, les journalistes se tournent vers la Scop pour une raison simple : « notre média appartient à ses journalistes ». En effet, dans une Scop, les salariés possèdent au minimum 51 % du capital, et sont dès lors associés majoritaires de leur entreprise. Dans le cas d’un média, une telle configuration garantit l’indépendance éditoriale.