Hunan TV, l’essor spectaculaire d’une télévision chinoise

Hunan TV, l’essor spectaculaire d’une télévision chinoise

Comment des chaînes privées chinoises, comme Hunan TV, réussissent-elles à lier recherche d'audiences, de ressources économiques et respect des normes audiovisuelles gouvernementales ?
Temps de lecture : 13 min

Depuis 2008, la Chine n’est plus seulement la manufacture de notre planète. Elle ne se contente plus non plus d’être un marché d’un milliard et demi de clients. Elle n’attend plus patiemment (et passivement) que les transnationales occidentales lui proposent leurs produits et leurs services, lui ouvrant ainsi les portes de la consommation et du monde. La Chine est sortie renforcée de la crise financière et, dans le cadre de son intégration à l’économie globalisée, elle a commis peu d’erreurs. Elle se sent désormais, assez forte pour affronter les multinationales étrangères, tant en Chine qu’à l’étranger.
 
Ceci s’illustre également dans le développement de son paysage télévisuel : bien que ce dernier soit né il y a à peine une trentaine d’années, il compte le tiers des téléspectateurs de la planète. Sur le demi-milliard d’appareils du pays, sont diffusées à l’heure actuelle près de 2500 chaînes quasiment toutes chinoises (1). Et les ambitions de ces groupes médiatiques sont désormais planétaires, alors que ces acteurs globaux de demain sont pourtant d’humble origine.
 
Ces chaînes, créées à l’origine au niveau local, ont longtemps grandi à l’ombre de CCTV, la Télévision Centrale de Chine. Chaîne d’État, CCTV a été la première à proposer au public chinois divertissements, jeux et séries quand la télévision a supplanté presse et radio officielles comme mass média de référence dans les années 80. Mais, contrainte de conserver le formalisme qui sied à une chaîne gouvernementale, CCTV a été dépassée sur ces terrains à partir des années 90 par ses concurrentes régionales proposant une programmation plus audacieuse. Ces chaînes ont proliféré dans un contexte favorable de décentralisation de l’audiovisuel. On pouvait en dénombrer plus de 4000 au tournant du siècle.

Parmi ces nouvelles chaînes concurrençant CCTV, Hunan TV, station de la province du Hunan, dans le centre du pays, se distingue très tôt par son attitude de précurseur et une suite quasi ininterrompue de succès en fait aujourd’hui le 2e groupe télévisuel chinois au sein de la structure HBS, Hunan Broadcasting Group.

Province de Hunan (source : Chinamtours)

Sa réussite rapide vient d’une succession de coups d’éclat médiatiques et, avec eux, d’une vision stratégique exacte de l’évolution du secteur. Hunan TV construit son succès en s’appuyant sur les jeunes et le divertissement. Ce positionnement est le fruit d’une adaptation constante aux changements advenus en Chine depuis 1983.

Des débuts remarqués

À cette époque, le gouvernement chinois décide d’étendre son paysage audiovisuel national jusque-là limité essentiellement à CCTV. Il charge alors les autorités des provinces, districts et grandes agglomérations urbaines de créer et financer leurs propres émetteurs de télévision et de radio. La situation économique se libéralise peu à peu et une décentralisation s’opère. Les pouvoirs locaux ont désormais la possibilité de stimuler et faire prospérer leurs communautés en ayant à leur disposition des médias régionaux qu’ils utiliseront comme vitrines. Le succès est fulgurant : 52 chaînes en 1983, 586 en 1992, 4000 en 1997 et 2500 désormais. La compétition est féroce, mais restreinte par l’implantation régionale de ces diffuseurs.
 
Pour conquérir de nouvelles parts de marché, leur unique option est la diffusion par satellite (2). Via le bouquet proposé par les télédistributeurs répartis dans le pays, les téléspectateurs chinois peuvent recevoir l’intégralité de l’offre de CCTV ainsi que les chaînes locales et régionales. Sur les canaux restants, les chaînes satellitaires des autres provinces sont ainsi en concurrence directe. Dès 1999, toutes les chaînes provinciales ont leur propre diffusion par satellite. C’est sur ce créneau que Hunan Satellite Television se distingue pour la première fois. Grâce à une programmation audacieuse et inédite, axée sur la fiction et la variété, elle surprend et attire. Rapidement, elle dépasse son assise locale originelle et gagne une renommée nationale et une prédominance incontestable : elle reste par exemple leader de l’audience des chaînes satellitaires pendant pas moins de 80 mois d’affilée (soit près de 7 années consécutives). Hunan TV se différencie ainsi à partir de la fin des années 90. Elle prend la voie du divertissement populaire, conçu sur la base d’études de marché, de formats parfaitement calibrés (3) et de séries, très rentables en termes de revenus publicitaires et de syndication et omniprésentes sur les écrans chinois. Hunan TV se joint donc très tôt à la vague de la culture globalisée. Elle crée la surprise dans une Chine encore culturellement largement refermée sur elle-même, avec parfois un parfum de scandale : en 2003, une émission météo présentée par des starlettes en tenue suggestive subit les foudres de la censure et est déprogrammée.
 
Si son ton et sa qualité suscitent la controverse, Hunan TV progresse rapidement en termes d’audience et de parts de marché. En une dizaine d’années à peine, son public croît de 65 à 880 millions de téléspectateurs, plébiscitant la chaîne pour ses programmes loisirs et divertissement.  C’est en 2005 que l’opinion publique mondiale découvre Hunan TV, avec « Super Girls » ou plus exactement « The Mongolian Cow Sour Yogurt Supergirl », parrainé par Mengniu, une marque de produits laitiers. Ce qui était à la base un simple télécrochet dérivé de « Britain’s Got Talent » a connu un retentissement phénoménal : 400 millions de spectateurs pour la finale, soit 11,6 % d’audience, un total de 300 000 candidatures et 60 millions de votes par SMS. Dans la vague de popularité que suscite le programme, c’est le succès de masse rencontré par le vote via SMS qui prend de court et donne à méditer aux autorités de tutelle. Hunan TV ambitionnait simplement d’augmenter ses revenus avec ces SMS payants. Mais ces fans de pop et de télévision prouvent de facto qu’il est possible aux citoyens chinois d’exprimer leur choix et de le transmettre instantanément, un modèle aux antipodes des mécanismes de représentativité en place. De plus, la victoire de Li Yuchun, à l’allure de « garçonne » décalée par rapport aux stéréotypes de la chanteuse de mandopop chinoise pré-formatée, fait également sensation et ouvre le débat.
 
Cette réputation de transgression rend Hunan TV populaire. Le public lui accorde sa confiance, comme le montre une récente rumeur : Hunan TV aurait sollicité la permission de développer son propre journal télévisé, au lieu de retransmettre la grand-messe du 19 h de CCTV-1 comme toutes les autres chaînes du pays. L’information est rapidement démentie, mais ne manque pas d’illustrer l’image d’indépendance dont jouit Hunan TV.
 
Si nous arrêtions ici notre analyse, nous pourrions nous contenter de présenter Hunan TV comme une vague d’air frais pour les téléspectateurs chinois et un vecteur de modernité. Avec ses programmes jeunes, décomplexés et ses audaces, Hunan TV incarnerait-elle le David de la période contemporaine face au Goliath des administrations de tutelle et du gouvernement central ?
 
La réponse est plus complexe. En observant son évolution au sein de son environnement institutionnel et administratif, il est en fait facile de voir que Hunan TV illustre autant qu'elle adhère aux objectifs et politiques à long terme du gouvernement central. Car, en dépit d’une expansion considérable dont Hunan TV est déjà l’emblème, le bourgeonnement du secteur atteint ses limites à la fin des années 90. Le goulot d’étranglement qui s’ensuit force à repenser en profondeur le paysage audiovisuel chinois et à préparer son ouverture à la globalisation. La réponse choisie par le gouvernement est de reprendre en main et de consolider le secteur - un remodelage bien exploité par Hunan TV qui en sort renforcée.
 
En réalité, Hunan TV ne constitue ni un opposant potentiel ni un groupe agissant à la marge du système. Elle incarne au contraire la nouvelle mouture du paysage audiovisuel chinois, commercialisé, institutionnalisé, placé à nouveau sous l’influence directe des autorités. Après une mutation structurelle, elle est prête non seulement à résister aux compagnies transnationales, mais à partir, elle aussi, à l’assaut du monde et de ses parts de marché. Les positions politiques et diplomatiques du gouvernement chinois ont beau ne plus apparaître dans sa grille de programmes (4), sa mainmise, qui s’opère désormais dans le domaine de la culture populaire, reste importante.

Le paysage médiatique chinois en pleine reconfiguration

La croissance des années 1990, dont Hunan TV profite pour émerger, entraîne des problèmes d’échelle pour le nouveau secteur télévisuel chinois.
 
Logo de SARFT (source : SARFT)

De fait, l’autorité de tutelle, la toute-puissante Administration d’État pour la Radio, le Cinéma et la Télévision (ou SARFT (5)), ne peut exercer son contrôle sur cette myriade bourgeonnante que par l’entremise des régions, municipalités et provinces, ce qui entraîne une perte d’influence directe pour le gouvernement central. En outre, cette implémentation locale et les limitations administratives et bureaucratiques empêchent ces émetteurs de se développer, de nouer des partenariats entre elles ou des acteurs extérieurs, les empêchant ainsi d’arriver à un état de maturité et de viabilité financières.
 
De plus, ces nouvelles chaînes en plein essor sont touchées par la crise asiatique de 1998. La baisse des revenus publicitaires qui s’ensuit les heurte de plein fouet. Alors que ces derniers avaient atteint des sommets, avec une hausse annuelle de 80 ou 90 % à la fin des années 90, ils retombent à moins de 20 % à partir de 1998, et 10 % à peine en 2000. Cette crise asiatique révèle un phénomène nouveau pour la Chine : l’exposition de son économie à des circonstances et événements extérieurs. Le contexte de libéralisation qui s’annonce suite à son entrée à l’OMC lui fait réaliser que son secteur audiovisuel, entre autres, reste une structure éminemment fragile en dépit de sa croissance vertigineuse. Et quid de l’influence étrangère ? Rupert Murdoch, perpétuellement relégué aux marges et qui a finalement abandonné la partie en vendant ses parts de China Media Capital après d’ambitieuses et coûteuses tentatives, n’est finalement que l’exemple le plus flagrant démontrant aux autorités la nécessité de se préparer à la concurrence transnationale qui les attend.
 
Consolidation et modernisation se révèlent donc nécessaires. L’objectif est de créer une industrie suffisamment forte pour qu’elle fonctionne selon les règles du libre marché tout en préservant le message et les visées officiels. Car l’enjeu ici dépasse évidemment l’économique. Pékin cherche alors, dans le contexte chinois où politique, culture et ordre social sont toujours intimement liés, à trouver un équilibre entre logique mondialisée et contrôle de l’opinion publique. Comme souvent en Chine, la vague de réformes vient du haut et son effet est déterminant. Entre 1999 et 2004, par des documents et annonces, émanant du Conseil d’État et de la SARFT, également via l’appui ouvert du 16e Congrès du PCC (2002), la mutation est enclenchée :
  • Ces groupes médiatiques repassent sous l’autorité directe du Département de Propagande du Parti. Ils sont de la sorte soustraits à l’influence de leurs « propriétaires » naturels (les autorités locales et régionales qui avaient veillé à leur création dans les années 80), resserrant ainsi leurs rapports avec le pouvoir central.
  • Ils sont « invités » à séparer leur structure administrative et commerciale de leurs rédactions, l’information devant évidemment rester sous la supervision complète du gouvernement. Les rédactions continuent donc à fonctionner comme des administrations. Mais le reste de leurs activités de production, structurés et gérés sous la forme d’entreprises commerciales, peuvent désormais évoluer en fonction des lois du marché et s’ouvrir à l’apport de capitaux extérieurs, voire entrer en bourse.
  • Le développement de partenariats entre divers groupes médiatiques ou transrégionaux est autorisé et promu. À condition d’avoir été agréées préalablement, des compagnies privées ont le droit de produire des programmes télévisés.

Hunan Broadcasting Group, nouveau conglomérat tourné vers l'international

La contraction au tournant du millénaire est donc difficile pour ces jeunes stations de télévision en plein développement, notamment pour Hunan TV qui vacille pour la première fois et traverse une crise financière sérieuse. La chaîne fait pourtant le pari de persister sur la voie de la commercialisation : en 2002, Hunan TV décide de se concentrer uniquement sur les 16-24 ans. Elle supprime ainsi de sa grille toutes les émissions généralistes et produit toujours plus de séries, de talk-shows et de jeux, tout en cherchant à tirer profit de toutes les retombées commerciales possibles. En cela, Hunan TV confirme une fois de plus qu’elle reste à la pointe de ces réformes et mutations, les précédant souvent et avec succès.
 
Même d’un point de vue structurel, Hunan TV évolue rapidement. Dès 1997, le groupe scinde ses opérations. Toutes ses activités non liées à l’information sont transférées vers la structure Hunan TV & Broadcast Intermediary Corporation. Celle-ci entre à la Bourse de Shenzhen en 1999 (6). Un mouvement qui se révèle trop audacieux pour la SARFT qui interdit temporairement de telles pratiques. Cependant, cette pratique est prônée quelques années plus tard comme ligne de conduite à suivre. Hunan TV opte donc pour la diversification et l’intensification de ses activités commerciales dans un environnement qui lui permet de développer ces opportunités de synergie. Ces deux dernières années, des accords de partenariat cruciaux ont ainsi été conclus pour démultiplier le champ d’action de Hunan TV. Déjà propriétaire du label EEMedia, qui représente certains des plus célèbres artistes chinois et développant beaucoup de séries télévisées et de programmes musicaux, HBS se lance encore plus en avant. En 2009, Hunan TV crée la société de production et de distribution Shengshi Films, en association avec Shanda International. L’entreprise dispose d’un capital de 600 millions de yuan renminbi principalement fourni par Shanda. Shanda est loin d’être un partenaire anodin. Il s’agit en effet du leader en Chine des ultra-populaires jeux en ligne et il possède également une maison d’édition, offrant ainsi de vastes possibilités de synergie et de déclinaison d’un même produit ou contenu via différents supports.
 
Hunan TV cherche résolument à accéder aux opportunités créées par les nouveaux médias. En effet, les perspectives sont intéressantes : le taux de croissance de la publicité vidéo en ligne devrait augmenter de 35 % à 45 % dans les 5 années à venir, avec un marché estimé à 5,2 milliards de dollars en 2014. Dans la lignée de Happigo, une chaîne de télé-achat lancée en 2006, Hunan TV s’allie en 2009 à Taobao.com, l’équivalent chinois d’eBay, et en 2010 à QQ, le logiciel chinois de messagerie instantanée et véritable réseau social. Un autre accord, toujours en 2010, conclu avec AdChina lui apporte expertise en B2C et en e-commerce. Comme l’a déclaré Ruobo Zhang, CEO de Hunantv.com: « Hunantv.com […] a construit une ligne de produits de divertissement qui intègrent l’actualité, la vidéo en ligne, les réseaux sociaux, les jeux en ligne et des services via Internet, la téléphonie mobile et la télévision digitale […] ».
 
Dans le domaine télévisuel, deux avancées  majeures récentes consacrent son nouveau statut de groupe médiatique national et international. D’une part, Hunan TV rachète en 2009 Qinghai TV, chaîne de la province du Qinghai, une région pauvre et désertique du sud-ouest de la Chine. D’autre part, elle crée une société de production chargée de toute la programmation de Qinghai TV, hormis évidemment les actualités locales. Hunan TV détient la majorité des parts de cette nouvelle société et fournit la majeure partie de son personnel. Bref, un rachat, mais qui semble profiter à tous avec une hausse de 174 % des téléspectateurs de QTV entre décembre 2009 et mars 2010. Son image est désormais celle de la chaîne « verte » du groupe, en accord avec la nature rurale et sauvage du Qinghai lui-même.
 
Hunan TV aspire également à s’implanter à l’étranger et c’est le premier émetteur provincial à s’imposer. Elle est présente via satellite depuis 2000 aux États-Unis. En 2002, elle lance une chaîne satellite internationale, The Global Channel, basée à Hong Kong, lui donnant ainsi plus d’autonomie vis-à-vis des autorités de tutelle de la partie continentale. En 2004, elle rejoint le « Great Wall Chinese TV Network », un bouquet de chaînes chinoises accessible sur abonnement. Désormais implantée au Canada, en Australie, à Hong Kong, en France, au Mexique, au Brésil et à Taiwan, entre autres, Hunan TV est le diffuseur provincial chinois le plus populaire à l’étranger.
 
Mais sa vision évolue. Retransmettre des programmes destinés au public chinois de la partie continentale à sa communauté expatriée n’est plus suffisant. C’est la raison pour laquelle elle ouvre en avril 2010 MangoTV, dédiée exclusivement à la diffusion par satellite d’un contenu entertainment. La chaîne est ainsi résolument tournée vers l’extérieur : des campagnes internationales sont lancées pour recruter des présentateurs et des candidats parmi les Chinois de la diaspora et il est largement tenu compte dans la programmation du caractère globalisé de ces nouveaux publics. Comme le prouve l’évolution de son slogan : de « Kuai le Zhongguo » (« La Chine heureuse ») à « Kuai Le Quan Qiu Hua Ren » (« Les Chinois du monde entier heureux »). Et même au-delà. Car la Chine et les Chinois, où qu’ils se trouvent, ressemblent de plus en plus culturellement et socialement du reste du monde. C’est en prévision de ce rapprochement et pour conserver sa prééminence que la Chine s’est lancée dans une telle refonte de son secteur télévisuel.
 
Aujourd’hui, renforcée par sa position de force au sein de l’économie mondiale après la crise de 2008 qui lui a ouvert les portes des marchés internationaux, la Chine se sent désormais capable d’affronter les compagnies transnationales sur leur propre terrain. Car, comme Zhang Huali, vice-président de Hunan Satellite TV, l’expliquait en 2000 « C’est seulement lorsqu’une telle situation se produit que des groupes peuvent émerger, et alors seulement nous pourrons concurrencer des compagnies internationales comme Murdoch […] Autrement, quels que soient les efforts faits par le gouvernement pour apporter nos chaînes en Europe ou en Amérique, seuls les Chinois de l’étranger les regarderont ».

Conclusion

Le succ&egegrave;s semble complet pour Hunan TV et pour le secteur télévisuel chinois. Mais, sous le récit de cette réussite fulgurante, des questions subsistent quant à la pérennité du système. Les changements ont été rapides, les contrecoups peuvent également l’être. La refonte et le développement subis au cours de la dernière décennie paraissent libres et obéissant aux règles du marché. Pourtant, il ne faut pas oublier qu’il ne s’agit que d’un processus institutionnel activé à l’instigation du pouvoir central. Actuellement, si la recherche du profit est un objectif partagé par le Parti, quelle en serait l’issue s’il venait à entrer en contradiction avec les projets officiels ? De même, l’arrivée d’acteurs extérieurs, investisseurs boursiers, compagnies, partenaires, ne peut qu’inéluctablement réduire la mainmise des autorités.
 
La dualité de l’identité de ces nouveaux groupes médiatiques chinois propose une solution pratique à des dynamiques apparemment opposées, mais soulève aussi la question de leur nature, entre entités administratives, institutions publiques et entreprises. Une multiplicité de statuts qui n’existe pas en Occident, mais qui représente de plus en plus la structure prédominante qu’utilise le socialisme à caractéristique chinoise dans ses relations économiques avec le reste du monde.
 
De même, il nous faut garder à l’esprit l’aspect culturel et politique de cette expansion. Comme le dit Jing Wang, chercheuse étudiant la culture populaire chinoise : « Non seulement l’État postsocialiste a disparu du tableau, mais il a de plus renouvelé sa capacité, via le marché, à influencer l’agenda de la culture populaire ».

Références

Ruoyun BAI, « Media Restructuring, Commercialization and the Blitz of Television Entertainment in the New Millennium China », Annual meeting of the International Communication Association, New York City, 25 mai 2009
 
 
David BARBOZA, « Hunan TV cancels the bland to bring the offbeat to China », The New York Times, 27 novembre 2005
 
Zhen CAO, « Hunan TV’s success leaves others trailing », Shenzhen Daily, 27 juillet 2007
 
Liminand CHEN, Zhiwei FENG, « Hunan TV, Taobao.com set to form alliance », ChinaDaily, 30 décembre 2009.
 
 
CFensi « Hunan TV aims for the world », 12 mars 2010
 
 
Wei LIU, « TV stations cooperate in new venture », ChinaDaily, 27 mai 2010
 
Rose MAJOR, « Hunan TV HK launch is first move outside China », Baidu.com, 18 mai 2009
 
Myfew.net « Hunan TV International: An Introduction », 21 avril 2010
 
 
PR Newswire: « Shanda Announces Joint Venture with Hunan TV », 12 novembre 2009
 
Doug YOUNG, « News Corp sells controlling stake in China TV channels », Reuters, 9 août 2010
 
Yi Lei ZHOU, « Hunan TV brings television shopping craze », HKDTC.com, 11 avril 2006


--
Crédit photo : capture d'écran hunantv.com

(1)

Et officiellement toujours aucune étrangère, hormis quelques exceptions dans la province du Guangdong, à titre expérimental, voir explications ci-après. 

(2)

Précisons bien qu’il ne s’agit pas ici de réception par les particuliers via des antennes (ceci est officiellement interdit en Chine depuis 1993), mais vers les relais des divers télédistributeurs répartis dans le pays. 

(3)

Comme le fait remarquer l’universitaire Bai Ruoyun, cette évolution s’inscrit par ailleurs dans une tendance mondiale. 

(4)

Une visite sur son site le prouve : la page d’accueil et la majorité de son contenu ne sont consacrés qu’à la variété et à la programmation. Sa section « news » se rapporte à des nouvelles anecdotiques et triviales, l’actualité officielle étant reléguée sous la forme d’un simple fil de dépêches.

(5)

State Administration of Radio, Film, and Television. Celle-ci dépend directement du Conseil d’État.

(6)

La chaîne possède 51 % de ses parts, certains membres du personnel 29 % et des investisseurs privés les 20 % restant. 

Ne passez pas à côté de nos analyses

Pour ne rien rater de l’analyse des médias par nos experts,
abonnez-vous gratuitement aux alertes La Revue des médias.

Retrouvez-nous sur vos réseaux sociaux favoris

À lire également