Des joueurs adulés par des milliers de fans, un gouvernement qui fait activement la promotion de l’industrie des jeux, des ligues de joueurs professionnels sponsorisées par de grands comptes, des chaines de TV dédiées 24H/24 aux jeux, des centaines de milliers de personnes se réunissant dans des stades pour assister à la retransmission de compétitions... Cela paraît improbable?
Pourtant c’est exactement ce qu’il se passe en Corée du Sud, la « Mecque » du jeu en ligne.
D’après le Samsung Economic Research Institute, il y a environ 17 millions de joueurs en Corée, ce qui signifie qu’un tiers de la population joue régulièrement à des jeux(1).
Lorsque l’on regarde la répartition du marché sud-coréen des jeux vidéo tous secteurs confondus (jeux en ligne, jeux mobiles, jeux sur consoles, jeux d’arcades, salles d’arcades, cybercafés), il est frappant de constater que les jeux en ligne représentent 70,8 % des ventes. Alors que le marché global du pays est estimé à 8,80 trillions de wons en 2011 (environ 6,2 milliards d’euros), les ventes de jeux en ligne s’élèvent à 6,23 trillions de wons (soit environ 4,4 milliards d’euros).
À la seconde place, on trouve le marché des cybercafés locaux – les PC bangs – avec 19,5 % de part de marché. Les jeux vidéo sur consoles sont loin derrière, avec seulement une part de marché de 3 %, ce qui représente autour de 268 millions de wons (environ 183 000 euros).
Les jeux sur consoles constituent généralement une part significative du secteur des jeux vidéo(2) – ce n’est pourtant pas le cas en Corée, ou aucune autre plateforme ne peut rivaliser avec les jeux en ligne. Comment expliquer cette spécificité du marché ?
Outre certains aspects culturels, trois évènements historiques en particulier ont joué un rôle décisif dans le développement du marché des jeux en ligne: l’occupation japonaise, le rapide développement des infrastructures IT soutenu par le gouvernement, et la crise financière asiatique de 1997.
Après la Seconde Guerre mondiale et après plus de 30 ans de domination japonaise, les produits culturels japonais – dont les populaires consoles de jeux de Sony, Nintendo et Sega – ont été interdits en Corée jusqu’en 1998. En plus de ce protectionnisme, le sentiment négatif à l’égard du pays et de ses produits est resté vivace pendant de nombreuses années. C’est l’un des facteurs permettant d’expliquer que les jeux sur consoles ne soient pas devenus aussi populaires en Corée que dans les autres pays.
D’autre part, dès 1994, le gouvernement sud-coréen a décidé d’investir considérablement dans le développement des infrastructures de télécommunications. Cela a permis au pays de se doter d’une infrastructure développée de câbles sous-marins et de satellites, ainsi que de ressources Internet solides. Au sortir de la crise de 1997, les nouvelles technologies de l'information et des télécommunications sont plébiscitées comme « nouveau moteur de croissance » par le gouvernement sud-coréen...
C’est l’une des raisons pour lesquelles le pays est maintenant doté des connexions Internet les plus rapides au monde – ce qui a très probablement joué un rôle prépondérant dans le développement des jeux en ligne.
Deux jeux en particulier ont complètement modifié la structure du marché sud-coréen des jeux : NEXUS: The Kingdom of the Winds et Starcraft. Avant 1996, le marché local était principalement concentré sur les jeux d’arcades. Avec la prolifération des copies illégales, les jeux sur PC étaient délaissés car jugés peu rentables. La sortie en 1996 du premier jeu graphique en ligne au monde, NEXUS: The Kingdom of the Winds, développé par l'entreprise Nexon, a permis de répondre à la fois aux problèmes de rentabilité du secteur et de protection des droits. S’inspirant d’une bande dessinée historique, ce jeu est l’un des tout premiers jeux de rôles en ligne massivement multi-joueurs – plus communément appelés MMORPG(3). Les MMORPG nécessitent que les joueurs se connectent à un serveur –, ce qui permet de contourner le problème des copies illégales. D’autre part, The Kingdom of the Winds est basé sur un principe d’abonnement : les utilisateurs paient un forfait mensuel pour pouvoir profiter du jeu.
Principaux éditeurs de jeux sud-coréens : NC Soft, Nexon, Neowiz, Softmax
Principaux éditeurs de jeux mobiles : Gamevil, Com2us, Theapps, KakaoTalk
Portails de jeux : NHN, CJ Internet, Neowiz…
Principaux développeurs de jeux : NC Soft, Nexon, Barunson, Gamevil, Com2us, WeMade Entertainment
Chaîne câblée spécialisée dans les jeux : Ongamenet
Télé sur Internet dédiée aux jeux : GomTV, PandoraTV
Portails Internet : Naver, Daum
Peut-on rire de tout ? En 2021, la question se pose encore concernant les dessins de presse. Une interrogation qui renvoie à la nature même de la caricature et à son histoire, ponctuée de barrières juridiques, morales, sociales.